Beaucoup de camping-caristes (français) ont envie de la même chose : l’hiver au Maroc, en Espagne ou au Portugal, visiter Carcassonne et le Mont-Saint-Michel au printemps, et trois semaines en été au bord du bassin d’Arcachon.
Résultat : certaines zones touristiques sont saturées, et les interdictions se multiplient. Heureusement, il reste encore possible de pratiquer le camping-car autrement. Voici quelques conseils pour échapper au sur-tourisme.
Symbole de liberté et d’évasion, le camping-car connaît depuis plusieurs dizaines d’années un succès croissant. On compte aujourd’hui plus de 500.000 véhicules en circulation dans l’Hexagone. Dans certains lieux touristiques très prisés, on voit le revers de la médaille. Aires de stationnement bondées, places de camping limitées au profit des mobil-homes, et bivouacs “en sauvage” presque impossibles. Il nous semble légitime de nous poser cette question : y a-t-il trop de camping-cars ?
Trop ? Non. Sauf si nous allons tous au même endroit au même moment !
Des interdictions, mais pas assez d’aires et campings
La concentration excessive de camping-cars dans certains lieux est un phénomène qui prend de l’ampleur en France, mais aussi en Europe du Sud ou encore au Maroc pendant l’hiver. Il devient très compliqué de trouver une place sur une aire de stationnement située en bord de mer, comme par exemple en Algarve ou en Andalousie, où les camping-caristes réservent leurs emplacements d’une année sur l’autre, de peur de perdre leur place.
Idem pour les campings du côté d’Agadir, qui, à partir du 15 janvier, affichent complet jusqu’au mois de mars. En août, sur le littoral, chacun veut sa part de rêve. On fait même la queue devant l’entrée de certaines aires, en attendant qu’une place se libère, comme nous l’avons constaté cet été sur l’aire de Biscarrosse dans les Landes. Pas assez d’aires, de plus en plus d’interdictions… La situation devient complexe et un sentiment d’exclusion gagne certains adeptes.
Les anecdotes et avis des camping-caristes
Marie et Jean-Pierre de Mérignac (33) : “une barre de hauteur sur notre petit coin de paradis”.
“Nous sommes camping-caristes depuis plus de 20 ans. Il est certain que les choses ont bien changé depuis notre premier voyage. À l’époque, nous passions tous les week-ends sur un parking de plage en Gironde. J’allais pêcher en surf-casting pendant la soirée, et nous passions la nuit sur place. C’était merveilleux ! Les gendarmes, à l’époque, nous connaissaient bien et s’arrêtaient même pour discuter avec nous, sans jamais nous verbaliser, juste pour voir si tout allait bien. Petit à petit, les camping-cars ont trouvé l’endroit sympathique, et nous nous sommes retrouvés à une vingtaine chaque week-end. Puis, un jour, nous sommes tombés sur un portique de hauteur érigé par l’ONF (Office national des forêts), interdisant l’accès à la plage sans explication et surtout sans solution alternative. Notre petit coin de paradis avait fermé ses portes. Conclusion : nous sommes tous responsables de la situation. Les autres camping-cars avaient autant le droit de profiter de l’endroit que moi, mais au final, voilà le résultat. Le surnombre de camping-cars attire inévitablement ce genre de situation et de restriction.”
Marion et Paul (62) : “Nous quittons la côte et tout va mieux”.
“Nous sommes partis cet automne sur la côte espagnole, pour passer une partie de l’hiver sous des températures plus clémentes que chez nous. À notre grande surprise, les campings et aires privées de la Costa Blanca étaient presque toutes complètes, remplies d’Allemands, de Hollandais, d’Anglais et d’Autrichiens. D’ailleurs, ce n’était pas tout à fait notre style de rester côte à côte, comme sur un parking de supermarché un soir de Noël. Alors, nous avons fait le choix de rentrer dans les terres pour trouver notre bonheur. Et ce fut le cas. Nous avons découvert de superbes paysages, des villages typiques sans le moindre touriste, de petites aires communales gratuites et des aires de vidange dans presque chaque village. Comme quoi, il faut s’ouvrir à autre chose et ne pas avoir peur de s’écarter de la côte.”
Catherine et Jean (69) : “Nous faisons du contre-tourisme”.
“Nous, c’est très simple, nous fuyons le monde. Nous sommes à la retraite depuis deux ans et partons à contre-courant. Nous allons à la mer en hiver, à la campagne au printemps, en montagne en été, et généralement à l’étranger en automne dans des pays comme la Suisse ou la Sardaigne, comme l’an passé. Le tout, c’est de bien préparer ses haltes. Il y a tout à disposition avec les applications sur Internet. Vous pouvez vous faire une idée du lieu de stationnement avec les photos des utilisateurs et vérifier l’environnement. Autrement, nous privilégions les petits campings municipaux en été qui sont rarement pleins et d’un tarif très abordable. Pour vous dire, nous refusons d’aller au Mont-Saint-Michel, même si le site est extraordinaire. Camper à cent camping-cars côte à côte, très peu pour nous. Faire du contre-tourisme, c’est un état d’esprit que tout le monde n’a pas.”
Erwan et Fiona (56) : “Loin de la foule agglutinée”.
“Nous pratiquons le windsurf depuis de nombreuses années. Nous partons souvent à la recherche de spots, que ce soit en France ou à l’étranger. Au printemps dernier, nous sommes descendus à Tarifa, dans le sud de l’Espagne. C’est la Mecque de la planche à voile et du kitesurf. Avec notre fourgon, nous nous sommes retrouvés sur un parking avec presque deux cents autres camions, immatriculés en Allemagne pour la plupart. Un vrai campement de gens du voyage ! Nous sommes restés deux jours et avons craqué. C’était insupportable de voir le comportement des uns et des autres, à la recherche d’eau comme des mendiants, ou vidant les eaux usées la nuit dans la forêt environnante. Nous sommes remontés vers la Galice, où certes le climat était nettement plus froid, mais nous nous sommes retrouvés avec quelques planchistes, loin de cette foule agglutinée. Pour ma part, je ne suis pas surpris que les autorités mettent de l’ordre. C’est une nuisance quand c’est trop. Il faut se mettre à la place des locaux, qui voient leur côte défigurée par des centaines de véhicules squattant pendant plusieurs mois aux abords des plages. Pourtant, je suis un mec plutôt cool.”
Céline et Jean-Paul (21) : “Il faudrait plus de campings au Maroc”.
“Nous sommes camping-caristes depuis une trentaine d’années. Au début, quand nous étions encore en activité, nous recherchions des endroits pour trouver le calme, loin de notre vie agitée de travailleurs. Fin des années 90, ce fut notre premier voyage au Maroc, où nous avons voyagé pendant presque un mois à travers tout le pays, des montagnes de l’Atlas au désert du sud. À l’époque, entre Agadir et Taghazout, il y avait presque 1000 camping-cars qui stationnaient en bord de plage en totale liberté, et la vie s’organisait comme un village éphémère pendant les mois d’hiver. Puis, un jour, les autorités ont décidé de mettre fin à cette concentration. À grand coup de tractopelle, ils ont creusé des fossés pour interdire l’accès. C’est un exemple parmi d’autres que la surpopulation de camping-cars peut amener à ce genre d’interdiction ! Les camping-caristes ont été obligés de se retrancher dans les campings, qui n’étaient pas très nombreux à l’époque. À présent, ils sont au nombre de trois au nord d’Agadir, et effectivement tous complets en hiver. Avec le succès grandissant du tourisme en camping-car dans le pays, il est évident qu’il faudrait en construire d’autres pour accueillir correctement les voyageurs. Oui, on l’avoue, nous réservons d’une année sur l’autre pour être certains d’avoir une place. Avec l’âge, on aime bien se retrouver entre amis pendant deux mois et demi chaque hiver, à profiter de la douceur et surtout de voir l’océan depuis notre véhicule. C’est un petit luxe que nous apprécions et que nous essayons de conserver tant que notre santé nous le permet.”
Richard (47) : “Les applis et les réseaux sociaux n’ont rien arrangé”.
“Je vis seul et à plein temps dans mon camping-car. Suite à une séparation, quelques temps après mon départ à la retraite, j’ai décidé de prendre la vie du bon côté en vivant sur les routes toute l’année. Pour ma part, je ne dors jamais dans un camping ni sur une aire de camping-car. Pour moi, c’est parquer les gens comme des animaux, et ça, très peu pour moi. Je m’y rends juste pour faire les services. Mais pour être en totale liberté, cela demande du temps, pas mal de recherches sur Google Maps et des kilomètres à parcourir. Les bons spots où l’on peut rester sans se faire foutre dehors commencent à devenir de plus en plus rares. Il faut dire que les applications et les réseaux sociaux n’ont pas arrangé cette histoire. Pour ma part, je m’écarte du littoral, car l’eau (l’océan, les lacs, les rivières) attire les camping-cars comme des mouches. Si vous sortez des sentiers battus, vous trouverez à coup sûr votre bonheur, en France comme à l’étranger. Moi, je n’ai pas peur d’être seul, perdu en haut d’un petit chemin de montagne. Je peux rester trois jours sans voir personne, et ça me va bien. Je comprends que tout le monde ne peut pas faire comme moi, et certains se sentent rassurés quand d’autres véhicules stationnent à leurs côtés. Mais moi, au contraire, ça me stresse.”
5 conseils pour éviter la foule en camping-car
Journaliste et photographe pour Le Monde du Camping-Car et le magazine Vanlife, Alain Vacheron réalise des reportages avec son véhicule depuis de nombreuses années. Ces dernières années, il a parcouru le Portugal, le Maroc, l’Italie, l’Espagne, et bien entendu la France, où il a pu constater que dans certaines zones très prisées par le tourisme, la pratique du camping-car devenait compliquée, voire indigeste… Aires de camping-car saturées, “à touche-touche comme des sardines”, interdiction de stationner ou même de circuler, campings complets, etc. Le phénomène du surtourisme n’est pas propre au camping-car, comme on peut le constater à Venise, au Mont-Saint-Michel ou sur les littoraux… Pourtant, il est possible d’échapper à la foule, en faisant des choix judicieux et en programmant de superbes circuits, avec des étapes agréables, dans des lieux souvent méconnus, qui restent encore à découvrir. Après presque 35 années de voyage en véhicule aménagé, voici ses 5 astuces pour réussir son voyage.
1. Si cela vous est possible, partez hors vacances scolaires. Rien ne vous empêche de profiter des plages océanes de l’Atlantique en choisissant le mois de septembre et son été indien, là où l’eau est encore bonne et les plages sont quasiment vides. Pour vivre depuis toujours dans les Landes, il peut vous assurer qu’après le 10 septembre, 80% des touristes sont retournés chez eux, et il ne tient qu’à vous de profiter de cette merveilleuse période.
2. Soyez curieux ! Sans partir à l’autre bout de l’Europe, notre belle France offre un potentiel de découverte presque inépuisable. Laissez tomber votre GPS qui ne fait que vous conduire d’un point A à un point B, mais optez pour une simple carte Michelin et choisissez les routes vertes. Vous allez découvrir des merveilles de paysages, loin des circuits classiques et souvent loin du monde, quelles que soient les régions, d’ailleurs !
3. Préparez vos étapes correctement. Les applications comme Park4night existent et rendent de sacrés services, mais encore faut-il savoir bien les utiliser. Pensez à préparer votre halte de nuit en début d’après-midi, car à 19h, il sera trop tard pour changer si elle ne vous convient pas. Choisissez plusieurs options pour pouvoir changer au dernier moment. Regardez les photos des utilisateurs ainsi que l’emplacement sur la carte pour vous rendre compte de l’environnement de l’aire et de la proximité de nuisances éventuelles comme le bruit d’une route. Soyez tolérant, dans la mesure du possible, car le spot parfait n’existe pas !
4. Passer l’hiver au Maroc du côté d’Agadir, pourquoi pas ! Mais sachez qu’il vous faudra réserver au moins un mois d’affilée dans le même camping, autrement vous n’aurez pas de place. Sinon, profitez-en pour visiter l’intérieur du pays, certes plus frais, mais bien plus tranquille. Idem pour l’Espagne et l’Algarve au Portugal : entrez un peu dans les terres, loin de la côte, et vous retrouverez un peu de sérénité, loin des aires bondées.
5. L’herbe n’est pas plus verte dans le champ d’à côté. Il faut savoir se poser, et éviter de vouloir toujours aller plus loin dans l’espoir de trouver plus beau encore. Par expérience, c’est une erreur. Prenez le temps de découvrir ce qu’il y a autour de vous : une randonnée, un musée insolite, un café original. N’hésitez pas à demander aux gens du coin, qui se feront un plaisir de vous parler de leur région. Pour finir, restez discrets et respectez les règles de bonne conduite qui sont les clés d’une bonne acceptation des camping-caristes.
Quoiqu’il en soit, revenez ici sur le site de Rando-Moto.be dans un futur assez proche, des roadbooks exceptionnels pour camping-cars (motorhomes) seront disponibles avec des haltes bien loin du tourisme de masse.
Par contre on choisira d’autres destinations que la majorité des français, ça c’est certain. Au fait, tant qu’on y pense, afin de bien profiter de nos roadbooks, tenez bien à l’œil la date de sortie du nouveau lecteur de roadbooks Tripy « 3 » qui devrait être disponible cette année encore.