Assemblée en Allemagne, la plateforme BMW F découle d’une base chinoise Loncin qui nous arrive désormais aussi directement de Chine sous la forme de l’excellente Voge DS900X vendue 4 000 € moins cher : le blason à l’hélice mérite-t-il toujours l’investissement ?
On ne peut pas dire que BMW ait vraiment mis l’accent sur le sujet mais à l’instar de la 900 GS, les deux autres trails série F évoluent en 2024. La basique F 750 GS prend le nom de 800 et reste la seule GS bridable A2 (avec la G 310 GS), tandis que la F 900 GS Adventure passe de 853 à 895 cm³ et dépasse les 100 ch. L’évolution de cette dernière est cependant moins visible car contrairement à la F 900 GS profondément remaniée, le design de l’Adventure ne change quasiment pas.
Mais désormais, les deux sœurs se complètent plus qu’avant car la 900 radicalisée et allégée tranche nettement avec la 900 Adventure qui demeure le maxi-trail au long cours que nous connaissions, bonifié par un regain de performances et un niveau de protection en hausse.
Néanmoins, les deux sœurs se complètent plus qu’avant car la 900 radicalisée et allégée tranche nettement avec la 900 Adventure qui demeure le maxi-trail au long cours que nous connaissions, bonifié par un regain de performances et un niveau de protection en hausse.
Mais cette bavaroise à moteur Loncin, suréquipée lorsque toutes les options sont présentes et plutôt onéreuses (prix de base 14 990 €, 17 990 € pour la version essayée), est-elle une vraie BMW ? Vaut-elle son prix face à la Voge DS900X beaucoup moins chère ? Quelques questions auxquelles nous allons tenter de répondre.
Quand on connaît la 850 2019 du même nom, difficile de voir une nouveauté dans la F 900 GS Adventure 2024. Pourtant, cette moto évolue nettement même si plus discrètement que la version classique qui a perdu 14 kg et récupéré le moteur plus puissant et plus coupleux des F900R et XR poussé à 105 ch.
BMW F 850 GS 2019
BMW F900GS 2024
La F/GS Adventure ne perd ainsi pas un gramme et n’est que très modérément restylée (l’aluminium brossé ne recouvre désormais plus que la partie haute du réservoir de 23L et le petit saute vent est remplacé par un pare-brise plus haut) mais elle bénéficie du moteur et des suspensions plus performantes proposées sur la F 900 GS.
Ce qui change
La F / GS Adventure troque ainsi le 853 cm³ contre le 895 cm³ des F 900 R et XR, soit le bicylindre parallèle 8 soupapes Loncin calé à 270° que nous connaissions en 853 cm³, réalésé de 2 mm. Il développe désormais la puissance de 105 ch à 8 500 trs/mn (contre 95 ch à 8 250 trs/mn) . Notez aussi que si la valeur de couple maxi varie peu (+ 1 NM, 500 trs/mn plus tard), cette motorisation est nettement plus coupleuse sur toute la plage de régime par rapport à l’ancien 853 cm³ puisque les 8 mkg sont dépassés dés 2 900 trs/mn et jusqu’à 9 000 trs/mn alors que cette valeur était auparavant atteinte sur une plage de régime beaucoup plus réduite (4 100 trs/mn à 8 200 trs/mn).
Coté partie cycle, la nouvelle GS Adventure bénéficie de la nouvelle fourche inversée entièrement réglable Showa apparu sur la GS accompagnée d’une suspension arrière pilotée optionnelle Dynamic ESA avec un amortisseur ZF Sachs sur la version que nous avons essayé. Les débattements restent fixés à 230 mm à l’avant et 215 mm à l’arrière, des valeurs respectables pour un trail voyageur. L’Adventure ne peut cependant pas bénéficier des suspensions améliorées du Pack Enduro Pro de la GS de base. L’empattement diminue de quelques mm, un détail vraisemblablement liés à la longueur de la chaîne de transmission puisque le châssis et bras oscillant ne changent pas et que les roues de 21’’ et 17 ‘’ sont toujours de mise.
La F 900 GS Adventure reçoit également en série l’ABS optimisé en virage dit « ABS Pro », le traction control DTC déconnectable et les poignées chauffantes, mais seulement deux modes de conduite (rain et road): il est donc nécessaire d’envisager le Pack « Finition Ride Pro » à 3 000 € qui permet de bénéficier de l’assistance MSR (contrôle électronique du couple moteur au rétrogradage), du shifter monté/descente, des modes de conduite supplémentaires Dynamic, Enduro et Enduro Pro, du régulateur de vitesse, de la suspension arrière pilotée ESA Dynamic et d’autres options telles que le démarrage sans clé, l’appel d’urgence intelligent, les supports de valise aluminium, les feux additionnels à LED, la béquille centrale et la préparation GPS. Bref, de toutes les options sauf le silencieux sport (555 €) et les pneumatiques à tétines (50 €) ; les crash bar, le sabot alu et le porte-paquet font toujours partie de la dotation de série.
Infodivertissement et aspects pratiques
Ainsi, même si la base châssis / moteur / jantes est similaire, voire identique à ce que propose Voge et qu’il est probable que de nombreuses pièces soient communes, BMW propose une moto nettement différente en termes de finition, de qualité perçue mais aussi sur ce tout qui concerne l’infodivertissement.
La teutonne bénéficie du TFT couleur de 6,5’’ commun à de nombreuses machines de la gamme. Les fonctions d’ordinateur de bord sont nombreuses (plusieurs trips, consommation, autonomie, etc) et la navigation dans les menus est intuitive et facile. Très largement connecté, ce dernier peut être synchronisé avec l’application smartphone gratuite BMW Motorrad Connected, vous bénéficiez alors d’un système de guidage au tableau de bord avec prise en compte du trafic en temps réel, et de toutes les informations concernant votre machine sur le smartphone.
Le tout se pilote via la molette multi-controller typique des productions munichoises. Le contrôle de traction se désactive par un bouton au commodo gauche, le réglage du mode de suspension arrière par un autre bouton. Et le mode de conduite optionnel permet d’être entièrement personnalisé (réponse à la poignée, frein moteur, réglage d’ABS). Dans ce domaine, BMW prend nettement l’avantage sur Voge à l’électronique est moins ajustable. Est ce que cela vaut la différence tarifaire ? C’est à vous de voir.
Lorsque l’énorme réservoir de cette grosse moto est rempli de ses 23L de carburant, et que les grosses valises latérales, même vides, sont montées sur les solides racks en acier la F900GS Adventure impressionne. La hauteur de selle est plutôt contenue pour un maxi-trail à jantes de 21’’ à l’avant, mais monter à bord reste compliqué car non seulement l’assise culmine à 875 mm, ce qui n’a rien d’anecdotique, mais surtout, lesdites valises sont très larges et relativement rapprochées du poste de pilotage : les enjamber n’est vraiment pas évident.
Relever la machine de sa béquille latérale nécessite aussi un effort important; le poids est sensible. C’est aussi le cas de la mise sur béquille centrale car la manœuvre est malaisée car l’ergot de béquille est peu accessible à cause du positionnement de la platine passager gauche : typique de la plate-forme, ce défaut se retrouve aussi sur la Voge DS900X.
Au quotidien
Mais une fois installé aux commandes, la selle confortable s’avère nettement plus accueillante que celle très ferme de la F900GS. De plus, la position de conduite avec buste droit et guidon relativement large est agréable. Les repose-pieds avant semblent implantés au même endroit que sur la F900GS, les jambes sont dépliées et l’énorme réservoir reste malgré tout étroit entre les genoux : les jambes ne sont pas trop écartées.
Les premières évolutions révèlent le côté feutré de cette moto. Par rapport au 853 cm3, le 895 apporte un regain de couple et de souplesse à bas régime et les suspensions efficaces gomment à peu près tout ; le confort est en nette hausse. Le rayon de braquage est réduit et les demi-tours sont aisés, à condition de n’avoir ni le plein, ni les valises car le poids reste sensible. Comme c’est le cas sur la 900GS, le twin revisité est légèrement plus de rugueux à partir de 3 000 trs/mn : en conduite dynamique, la 900 GS Adventure donne ainsi plus de sensations à son pilote, mais l’évolution n’est pas une transformation, le moteur Loncin demeure très linéaire, le petit regain de pep’s à 4 000 trs/mn qu’on ressentait sur le 853 cm³ est gommé et le 895 tracte sans relâche jusqu’à 9 000 trs/mn. Cette motorisation distille également son lot de vibrations, mais elles ne provoquent pas de fourmillements. C’est l’un des points sur lesquels BMW domine nettement Voge qui filtre beaucoup moins: les ingénieurs bavarois ont sans doute rajouté des silent blocs par-ci par-là.
Aussi, le shifter optionnel du pack « Finition Ride Pro » très doux, presque spongieux, typique de chez BMW, renforce encore l’impression générale de douceur. La protection du bas du corps est excellente mais ce moteur dégage énormément de chaleur, surtout à gauche : les remontés d’air deviennent pénibles dés 20°C de T° extérieure.
Pour le haut du corps, les petits déflecteurs combinés au pare prise réglable en hauteur sont efficaces : seuls les bras, des coudes aux épaules, ainsi que la tête (pilote de 1 m 84) sont exposés au flux d’air, le buste demeure bien abrité.
En revanche, la selle pilote agréable au premier abord n’est plus si accueillante sur long parcours car l’assise est relativement étroite et la mousse manque légèrement de fermeté : malgré la qualité de l’amortissement, le mal au fondement survient au bout de quelques heures de conduite et il paraît difficilement envisageable de passer 10 h en selle comme sur d’autres BMW.
En conduite sportive
Dans ce type de conditions, lorsque la moto est chargée, le freinage avant à deux étriers flottants à pistons juxtaposés atteint ses limites. L’ensemble fonctionne dans l’absolu,mais les mêmes éléments (étriers, disques) commandés par un maître-cylindre radial comme le propose Voge offre un feeling nettement meilleur.
Les suspensions aux débattements importants exigent d’être réglées plus fermes pour ralentir les transferts de masse, au détriment du confort, mais est ce bien nécessaire ? La F900 GS Adventure s’envisage plutôt comme une moto de voyage.
Plutôt qu’être brusquée, elle préfère enrouler les virages d’autant plus rapidement qu’elle est plutôt neutre dans les enchaînements : l’inertie caractéristique des motos à jante de 21’’ n’est pas sensible sur ce modèle (équipé ici d’excellents Metzeler Karoo 4) et bien qu’important, l’empattement ne compromet pas l’agilité dans le sinueux.
Dans les chemins ?
À l’instar de sa sœur F 900 GS « normale », la version Adventure est adaptée aux escapades hors bitume à condition d’alléger au maximum l’équipage en laissant les grosses valises alu à la maison et en ne remplissant pas à fond le réservoir.
La position debout est plutôt agréable car l’arcade de selle est étroite et le réservoir n’écarte trop les jambes. Le guidon se révèle en revanche un peu bas : sans doute que les rehausses disponibles pour le modèle GS seraient appréciées sur la GSA.
Le mode de conduite optionnel tout terrain Enduro Pro est particulièrement sécurisant, avec une réponse douce du gros twin et un ABS qui reste engagé sur la roue avant, et permet ainsi aux moins professionnels des amateurs de chemins de sauver leur moto en cas de freinage réflexe !
Difficile de comprendre la discrétion du constructeur bavarois concernant cette F 900 GS Adventure : par rapport à la concurrence « interne », elle est incomparablement plus adaptée au voyage (duo , bagages, autonomie) que ne l’est la F 900 GS, plus ludique. Elle est certes moins confortable que la R 1300 GS et nous ne pouvons pas encore comparer avec la R 1300 GS Adventure, mais le tarif est beaucoup plus accessible. Par rapport à la Voge DS900X, beaucoup moins chère, les GS sont plus puissantes de 10 ch mais ce n’est pas un critère car il ne s’agit pas de motos sportives. En revanche, la GS Adventure dispose de suspensions plus adaptées à l’usage tout terrain, d’une électronique largement plus personnalisable à condition de s’offrir les packs et elle se montre plus confortable car les vibrations sont mieux maîtrisées. Bien évidemment, le tarif est en rapport puisqu’une Voge coûte 4 000 € de moins et même 7 000 € de moins par rapport à une Adventure équipée. Par rapport aux KTM 890 Adventure, la BMW est certes un poil moins sportive mais elle est aussi plus confortable, beaucoup moins chère et peut être mécaniquement plus fiable. Les Aprilia Tuareg et Yamaha Ténéré sont moins puissantes. Finalement, les machines qui semblent les plus proches dans l’esprit semblent être la Triumph 900 Tiger Rally Pro et la Honda Africa Twin 1100 Sport. La japonaise est moins agile dans le sinueux et sans doute un peu moins protectrice, ce qui fait de la britannique, sans doute la concurrente la plus directe et la plus féroce, proposée à un tarif comparable: un comparatif à venir ?
On a aimé
+ Protection
+ Moteur
+ Electronique
+ Aptitudes off road
On n’a pas aimé
– Tarif élevé
– Guidon bas
– Confort de selle dans la durée
– Pack presque obligatoire !